On quitte Lodwar et sa chaleur intenable via le Sud. En point de mire, imaginaire encore, le Mt-Kenya. Voila qui motiverait!
C'est pas pour tout de suite...
Dans un but premier, rejoindre un digne asphalte serait pas mal du tout. On s'elance, les locaux nous le pronostiquent mauvais, nids de poule a gogo, mais a velo pas de probleme s'exclament-ils, facile a les eviter!
La realite:
Les nids de poule sont bien la, nombreux, on en evite certains, mais ils sont tellement nombreux que nos roues sautent a pieds joints plus souvent que voulu. Pour le tarmac, seulement dans nos reves! Il etait la, jadis, il y a bien 40 ans. Dorenavant, il se camouffle sous 20cm de sable et gravier. Non seulement pas d'asphalte a se mettre sous la roue, mais un revetement traitre - mi-sable, mi tole ondulee.
On en transpire sur ces 84 km et faisons etape a Lokichar en compagnie du Pere Rico d'origine Mexicaine. Un as de l'accueil chaleureux! Nous voila dans ce bled perdu ou toutes infrastructures et activites sont liees a notre personnage affaire dans ce lieu depuis belle lurette.
On tente d'obtenir des infos objectives sur la situation des prochains 80 km nous separant de Kainuk. Cette portion etant reputee pour ses bandits. Les Turkanas, armes a foison, aimant a arreter les voitures et les devaliser de leurs biens. Le Pere Rico ayant ete une victime dernierement, est bien place pour nous donner son opinion. OUI, bandits il y a, NON ils ne sont pas violents, juste menacants aides de leur arme dans le but d'obtenir de l'argent, telephones mobiles ou toute autre valeur. De son vecu, il n'a jamais eu vent d'une attaque sur etranger.
D'autres cyclos-voyageurs relatent la meme histoire avec conclusion qu'il vaut mieux charger le velo dans un camion et faire ce trajet vitesse express.
Rico nous ayant plutot rassure, on tente le coup, les valeurs planquees au fond des sacoches. Les kilometres defilent lentement, la piste est copie conforme a celle d'hier, excecrable.
Kainuk, notre village etape se presente, les bandits nous ont epargnes. Le plus dur n'ayant pas ete de rouler avec la crainte d'etre braque mais de subir cette piste infernale. On en conclut que l'excuse de charger les velos et de faire ce troncon en version motorise est du plus a l'horrible revetement plutot qu'aux pseudos bandits... on sonne a la porte du Pere Ricardo, un autre mexicain oeuvrant dans la mission du coin: Bienvenidos!
Accueil identique a son compatriote 80km en amont. On est attendu, Rico ayant lance un coup de fil a son collegue et ami: 2 cyclistes devraient frapper a ta porte ce soir, lui a-t-il transmis.
Le Pere Ricardo nous ouvre la porte, sourire tout d'abord suivi de quelques aveux. Il etait inquiet de nous savoir sur la route en cible reine, lui-meme s'etant fait braquer quelques mois auparavant. Nous rassurant aussitot, des la sortie du village, vous passez dans une autre province occupee par la tribue Pokot. Fini les mechants brigands... et encore mieux, le presque bon asphalte devrait faire son apparition dans pas moins de 60 km, denivelees en prime.
On quitte Ricardo, copieux p'tit dej au fond de l'estomac, traversons le pont marquant le debut de la zone Pokot. Verdure, le paysage change, on laisse le desert et sa chaleur derriere nous. Quelques lambeaux d'asphalte font leurs apparitions, des enormes troupeaux de bovins nous croisent, la pluie est la - etape a Ortum.
Dorenavant le goudron est roi, bien lisse comme toutes roues en reveraient. Le trafic reprend ses droits aussi, le camion fou etant roi, on sert a gauche.
On retrouve une civilisation, un developpement industriel, une meilleure infrastructure, du confort. Kitale - Eldoret - Nakuru, trois villes regorgeant de supermarches. On est stupefait lors de notre parcours le long des etalages: Nutella - Toblerone - Yogourts - patisseries et toute la cosmetique sont au rendez-vous. Ca faisait bien longtemps que les produits basics les avaient remplaces dans nos esprits. Allez, on se fait plaisir!
L'Equateur etant franchi, reste a traverser la fameuse Rift Valley - depression s'etendant du Nord au Sud depuis Israel jusqu'au Mozambique afin de voir poindre notre montagne fetiche cible. Subukia - Nyahururu, les plantations de the prennent place, vert a souhait, tout pousse par ici, fraicheur sous l'equateur en cette fin mai. La saison des pluies prend fin, les pommes de terre, tomates, mais, carottes sont reines. Le coin est des plus fertile.
Derniere etape, Nyahururu a Nanyuki, 2 options s'offrent a nous:
1) route classique, asphaltee, total 170km. Trafic a gogo, danger en puissance
ou
2) raccourci, on suppose env. 100km, une piste promise atlethique et sans indication de direction, tout loisir de s'y perdre
Soyons fous et flemmards, en avant pour la seconde option!
Le paysage change, la verdure laisse place a une vegetation aride, le trafic de camion est remplace par un elegant balai de velos et pietons. Cactus geant, vent de face et surprise, nos premiers animaux sauvages pour spectacle: des zebres trouillards a la robe elegante, des dromadaires nonchalants a notre passage et meme le roi a trompe! Nous voila recompenses de notre tentative hors sentier battu.
Fin de journee, fin de notre raccourci, les flancs attendus du Mt-Kenya sont bien la, voiles... .